lundi 23 octobre 2017

Le Réseau de la Santé québécois, malade de ses médecins?

Le Ministère de la Santé du Québec est le principal débiteur du budget national (+40%). Pourtant, les listes d’attente ne raccourcissent pas, les urgences ne désemplissent pas, les médecins de famille sont toujours si peu accessibles malgré la multiplication des «super-cliniques». À cela s’ajoute, un autre mécanisme qui vient produire davantage de lenteurs : la multiplication des actes réservés aux médecins. Un corps en sous-nombre, dont on rend ensuite les tâches incontournables, cela crée donc une situation de verrou qui vient bloquer l’engrenage du cycle des soins de santé. Ce sont maintenant plus de 20% du budget de la Santé leur est directement versés, en avez-vous pour votre argent?


Pourquoi une telle pénurie et une telle centralisation des tâches? Pourquoi ces situations ne sont jamais résolues? L’argent. En fait, nos différents gouvernements nationaux, soucieux de répondre au triple besoin : répondre à la pression des collèges des médecins canadiens, tous yeux rivés sur les salaires offerts par notre voisin du Sud; engager les finissants en médecine à rester au pays; et d’assurer un service de soins publics auprès de ses électeurs… Comment offrir des bons salaires compétitifs tout en conservant le service public? On assiste d’abord à des diminutions d’admissions dans les universités, et ce, inférieures au taux de renouvellement de la profession. Dans ce jeu où chaque dormeur d’un même lit se tire la même couverture à l’un ou à l’autre, hôpitaux contre cliniques; peu importe où les ressources humaines médicales sont attitrées, le problème demeure fondamentalement le même : les médecins sont trop peu nombreux par rapport à la population. Les besoins en personnel médicaux au Canada sont d’autant plus criants, que le Royaume-Uni et la France, pourtant, vivent eux aussi des pénuries. 

Cela entraîne alors nécessairement l’effet voulu, qui est celui où, ces médecins, étant en sous-nombre sur le marché, ils ont alors beaux loisirs de facturer plus souvent des actes médicaux. En outre, étant indispensables à cause de la concentration des responsabilités, donc davantage d’actes médicaux à facturer. Du reste, on diminue les contrôles et de suivis sur ces facturations de soins, les médecins, encore d’ailleurs des travailleurs autonomes : devenant leur propre juge de ce qu’ils veulent facturer ou non. Mais cela cause d’autres débordements, heures travaillées inhumaines, donc longues périodes de vacances s’en suivants; productivité globale potache. Facturation accessoire, sans parler des frais accessoires, donc inefficience dans les coûts par rapport aux soins reçus. …Mais l’argent est là : «payez-nous sinon vous nous perdrez».

Avant de finir, les défaillances de notre système sont-elles causées uniquement par les médecins? Petit groupe facile à désigner du doigt, et on pourrait même ajouter la caricature, d’un petit groupe ignoble s’enrichissant sans vergogne et ne laissant que des ruines derrière eux, aux dépens de la vie humaine; le Réseau de la Santé québécois, malade de ses médecins? Bien sûr que non.

Les défaillances ont des causes multiples. Outre les coûts salariaux, il ne faut pas oublier la pénurie généralisée de soignants, on pourrait énumérer celles : des infirmières, des préposés aux bénéficiaires, etc.? Structurellement, il y a aussi des causes systémiques. Le financement des soins des hôpitaux est déboursé selon des historiques organisationnels, et non directement à l’acte ou selon des cycles de soins. Cela entraîne un rationnement des fournitures médicales, un rationnement de la nourriture, un rationnement des feuillets autocollants… Le Réseau est également mal informatisé, ce qui freine tout élan de convergence et de productivité dont sont capables les technologies modernes: trop de vieux systèmes, mauvaise architecture d’affaire, priorités aux mauvais endroits et, au surplus, là-bas aussi un manque d’effectif suffisant pour venir à bout de la tâche.

Cerise (ou éléphant) sur le gâteau, la refonte du Réseau en CISSS et CIUSSS aura alourdi jusqu’à l’obésité morbide les organisations sous le poids de la lourdeur de leurs complexités. Cette réforme a annihilé les petits et moyens centres de soins centrés sur une mission de santé spécifique : au lieu de petites structures agiles et rapides à répondre aux besoins changeants de ses clients. Désormais, nous avons une entité mastodonte, opérant tout, mais excellant dans rien; lent à se mouvoir et détruisant tout sur son passage qui est responsable de nos soins. Mais ça, c’est l’éternel débat de la quantité versus la qualité, n’est-ce pas? Le Réseau de la Santé québécois est malade certes, à l’image du scandale du manque de douches et de bains pour nos aînés en CHSLD, quoiqu’en disent les slogans, les valeurs, et les plans stratégiques : c’est essentiellement parce que les besoins fondamentaux des usagers ne sont pas au cœur de la mission du Réseau que tout défaille; cet essentiel devenu accessoire.

Le Réseau de la Santé québécois est malade certes, à l’image du scandale du manque de douches et de bains pour nos aînés en CHSLD et qu'une justification médicale est nécessaire pour avoir un bain, quoiqu’en disent les slogans, les valeurs, et les plans stratégiques: c’est essentiellement parce que les besoins fondamentaux des usagers ne sont pas au cœur de la mission du Réseau que tout défaille; cet essentiel devenu accessoire. Et les milliards pleuvent en secret dans la poche des médecins, qui étant incorporés, sont exonérés d'impôts...



Sources:
Entente avec les omnipraticiens: ce n’est pas 1 G$ mais plutôt 1,6 G$
Plus de la moitié des médecins du Québec incorporés

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La rémunération totale des médecins québécois a atteint 7,3 milliards $ en 2015-2016, 8 % de plus en un an
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Médecins 

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