lundi 26 juin 2017

Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix 2010 enfin libéré en Chine


Le cynisme d'une dictature. Le prix Nobel de la paix 2010, le chinois Liu Xiaobo, emblème de la lutte pour la démocratie dans son pays, est sorti de prison après avoir été diagnostiqué le mois dernier d’un cancer du foie en phase terminale. 

Avant d'en arriver à cette célèbre chaise vide, où il ne put se rendre, pour cause de peine de travaux de rééducation, brillant étudiant, après avoir déposé sa thèse de doctorat où pointait déjà son sens critique, il devint en 1988 et 1989, professeur-chercheur invité à l'Université d'Hawaï et l'Université Columbia aux États-Unis. Privilège important, alors que les deux pays étaient toujours en guerre froide.

Fort de cette expérience, Liu Xiaobo revient ensuite en Chine pour devenir enseignant de l’Université normale de Pékin. Il avait participé en 1989 au mouvement prodémocratique de la place Tiananmen. Arrêté après la répression du mouvement, il devint alors un opposant: vocation qui naît d'elle-même, lorsque l'on est étiqueté par un régime oppressif. Il passa alors un an et demi en prison sans jamais avoir été condamné.

Une fois libéré, il ne sera plus autorisé à publier et à prendre la parole en public sur le territoire chinois. Il déclare : « Je ne pouvais plus m'exprimer qu'à travers les médias étrangers ». De fait, il continue à publier de nombreux articles dans la presse chinoise internationale. Au milieu des années 1990, Liu Xiaobo commence à travailler pour le magazine Chine Démocratique (Democratic China).

À cause de ses prises de positions, il est envoyé dans un camp de rééducation par le travail entre 1996 et 1999 et exclu de l’université. Revenu ensuite à la vie normale, il ne relâche pourtant pas ses efforts de moderniser la vie politique chinoise, des droits des citoyens et des travailleurs. Comme lors des troubles au Tibet, où, avec d'autres intellectuels chinois, ils lancent un appel pour demander au gouvernement chinois d'infléchir sa politique au Tibet et pour soutenir l'appel à la paix du Dalaï-Lama.

Autre engagement, celui-là décisif, Liu Xiaobo est un des auteurs de la Charte 08, voire son principal auteur. La Charte 08 a été signée par 303 intellectuels chinois en 2008, et depuis, par plus de 10 000 citoyens chinois. Elle a été conçue et écrite dans l'inspiration de la Charte 77 de Tchécoslovaquie, où, au mois de janvier 1977, plus de deux cent intellectuels tchèques et slovaques avaient formé une association de personnes unies par la volonté d'agir individuellement et collectivement pour le respect de l'humain et des droits civils... Dont un certain Václav Havel, écrivain, qui serait appelé à devienir plus tard président de son pays, qui appuiera Liu Xiaobo dans sa candidature au prix Nobel.

En Chine, il aura droit à un autre honneur: celui d'être arrêté chez lui par la police pour suspicion d’« incitation à la subversion du pouvoir de l’état ». Le procès subit plus d’un an après son arrestation, dure deux heures. Le 25 décembre 2009, il est condamné à 11 ans de prison pour subversion. C'est la peine la plus lourde qui ait été donnée pour l'inculpation de ce chef d'inculpation, créé en 1997. Derrière les barreaux, il y apprendra qu'il a remporté le Nobel de Paix. Il y passera tout son temps, jusqu'à ce que le cancer le rattrape et le condamne.


Ressources:
Libération du prix Nobel de la paix Liu Xiaobo, atteint d’un cancer
Chinese Prisoner Liu Xiaobo Awarded Nobel Prize in Absentia
Wiki Liu Xiaobo