Laissez-moi vous raconter ce récit de survivant comme en ne voit que dans les histoires et les contes!
Il était une fois Andreï Popov qui été appelé par son pays, la Russie, à devoir aller faire son service militaire qui était alors d'une durée de 2 ans, en tant que conscrit de l'armée. La Russie garde toujours le service militaire obligatoire et ne compte pas encore former une armée professionnelle.
Lors de son entraînement, il a subit, lui aussi, ce que les russes appellent la dedovchtchina (séances d'initiation brutales que réservent les anciens aux nouveaux appelés et qui font jusqu'à 1000 morts et des centaines de mutilés chaque année). Il a ensuite passé les premiers mois de son service militaire à construire une maison de campagne pour un officier de haut rang. Cette pratique est totalement illégale puisqu'un décret du ministre de la défense russe interdit formellement l'emploi de soldats à d'autres fins que militaires. Puis, un jour, il a été «enlevé». À sa "disparition" en octobre 2000, peu après une permission dans sa famille, il a été accusé de désertion par les autorités militaires. Mais il s'est plutôt passé une autre chose: ses officiers l'ont vendu à un entrepreneur véreux et on l'a forcé à travailler sans aucun salaire dans une usine de briques du Daguestan (sud du Caucase russe). Il y était mal nourri, souvent battu et vivait dans un wagon avec d'autres esclaves, comme des animaux: Andreï était devenu esclave dans une usine de briques!
Onze années plus tard, travaillant toujours comme un forçat, il se présenta une occasion: il réussit à s'enfuir. Au bout d'un long voyage de 20 jours, il a parcouru les quelque 1000 km entre le Daguestan, et Erchov, pour revenir dans son village natal dans la région de Saratov. Quand Andreï s'est approché de la maison familiale le 17 août 2011, sa maman ne l'a pas reconnu. Le visage du fils qu'elle croyait avoir perdu à jamais avait vieilli d'au moins le double. L'homme devant elle n'avait pourtant que 28 ans, mais il avait une peau craquelée de rides, presque plus de dents et des yeux oscillant entre la peur et le vide. Le pauvre Andreï revenait de l'Enfer que seul ceux des camps de concentration ont pu connaître.
Le lendemain de son retour à la maison, Andreï a voulu obtenir justice et est allé porter plainte pour enlèvement au poste de police local. En fouillant dans leurs dossiers, les agents ont retrouvé l'avis de recherche qui pesait sur lui en tant que déserteur. Ils l'ont tout de suite arrêté et placé en détention provisoire...Sans lui laisser enregistrer sa plainte! Belle justice, n'est-ce pas? Il n'est pas au bout de ses peines: il risque maintenant 10 ans de prison pour désertion.
Sa maman, sans doute affolée et au désespoir, a fait appel à l'Union des comités des mères de soldats. Cet ONG qui défend les droits des conscrits, s'est vu refuser un entretien avec Andreï Popov. Six jours plus tard, grâce à l'intervention de défenseurs des droits de la personne et un petit battage médiatique local, Andreï a été transféré vers une base militaire de Saratov. Les autorités militaires devront maintenant examiner sa version des faits. Souhaitons-lui que bonne justice soit rendu et à tous les coupables qu'ils l'ont traité comme un esclave.
Épilogue:
Parmi les conscrits russes, ce cas est loin d'être isolé. En 2006, un cas avait aussi ému l’opinion publique, à l’époque, un jeune conscrit, Andreï Sytchev, avait été amputé des deux jambes et de ses organes génitaux après avoir été la victime de sévices graves de la part de son sergent et des membres de son unité qui avaient causés une gangrène sévère. En 2009 par exemple, Anton Kouznetsov avait passé cinq ans dans huit usines de briques du Daguestan avant d'être retrouvé par sa grand-mère. Il avait alors accusé les commandants de son régiment de l'avoir vendu aux usines avec d'autres soldats, en échange de matériaux de construction!
Le service militaire est maintenant de 1 an en Russie.
Article 1
Article 2
Image tirée de l'article 1
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